Discours d’une membre de la diaspora syrienne
WZ, membre de la diaspora syrienne en Suisse
Bonjour à toutes et tous.
Je suis là aujourd’hui pour exprimer la solidarité du peuple syrien en révolution avec le peuple ukrainien. Le peuple ukrainien subit en ce moment même une agression barbare de l’armée de Poutine! Nos deux peuples ukrainien et syrien ont le même ennemi, et subissent ses exactions criminelles et la souffrance qui en découle.
Il y a 11 ans, le peuple syrien s’est soulevé contre le dictateur Assad avec des revendications de liberté, de dignité et de démocratie. Depuis 11 ans, le peuple syrien fait face à une répression barbare de la part d’Assad de Poutine et subit leurs exactions criminelles:
Disparitions forcées, arrestations, torture sauvage, tuerie, siège, famine, bombardement avec mêmes des armes chimiques, et le déplacement forcé de la population vers le nord syrien. Sans oublier le ciblage des hôpitaux, des écoles, des marchés, des boulangeries, des quartiers résidentiels, des centres de sauvetage et de protection civile, des usines de médicaments et de toutes les installations civiles…
Il y a 11 ans que la Russie de Poutine a choisi son camp et s’affirme comme soutien inconditionnel du dictateur criminel Assad. Depuis 11 ans, la Russie de Poutine a utilisé 16 fois son veto pour empêcher toute résolution en faveur de la protection des civils, en faveur d’une transition politique sans le dictateur Assad, en faveur de la traduction du dossier syrien au tribunal pénal international et même pour des couloirs humanitaires sous contrôle de l’ONU et sans influence du dictateur Assad.
Cela fait sept ans que Poutine a commencé une intervention militaire en Syrie pour empêcher la chute du dictateur et l’acheminement de la Syrie vers une démocratie.
Poutine a œuvré pour maintenir une marionnette au pouvoir, et pour mettre la main sur les ressources naturelles syriennes. Poutine a testé 231 nouvelles armes en Syrie et il s’en vante publiquement. Poutine a fait de Alep un deuxième Grozny… Aujourd’hui, il utilise le même schéma en Ukraine! Il encercle, il assiège, il bombarde les civil·e·s. Puis il détruit les villes et tente de mettre en place un bouffon du Kremlin.
Depuis l’intervention russe en Syrie, toute tentative onusienne de trouver une solution politique a été détournée par Poutine. Les pourparlers de Genève ont été remplacés par ceux d’Astana. Le parrain de la guerre en Syrie se prétend aujourd’hui le parrain de la paix.
La communauté internationale a fermé les yeux et s’est détournée de la souffrance de la population syrienne. Les sanctions contre Poutine, revendiquées par le peuple syrien, ont été refusées… Parce que ces sanctions ne correspondent pas aux intérêts financiers de l’Occident (qui sont le gaz et pétrole)!
Aujourd’hui, sur 23 millions d’habitant·e·s en Syrie avant 2011, on a
- 7 millions de Syrien·nes réfugié·e·s.
- 6 millions de déplacé·e·s internes dans les camps, privés d’aide humanitaire.
Dans ces camps, on trouve des civil·e·s de toutes les régions de la Syrie qui ont d’abord subi un déplacement forcé et l’exode. Et ces camps sont aussi ciblés par l’aviation de Poutine, le parrain de la paix en Syrie!
Aujourd’hui, notre sympathie avec la souffrance de la population ukrainienne a un goût extrêmement amer. Nous la connaissons si bien cette souffrance!
J’aimerais aussi dénoncer ici le recrutement par Poutine de mercenaires syriens pour les envoyer au combat sur territoire ukrainien, au côté des soldats et mercenaires russes de Poutine!
Honte à Poutine et à ses alliés!
Stop à la guerre de Poutine en Ukraine et en Syrie!
Oui à des sanctions fermes contre Poutine!
Oui à des couloirs humanitaires en Ukraine et en Syrie sous contrôle de l’ONU.
Vive la liberté pour l’Ukraine et pour la Syrie!
Pour s’orienter dans ce monde, il faut se munir d’une boussole: celle qui indique la solidarité avec les peuples
Sébastien Abbet, Comité de solidarité avec les peuples de l’Ukraine et avec les opposant·e·s russes à la guerre
Le 24 février 2022, il y a bientôt un mois, les troupes de la Fédération de Russie sont entrées en Ukraine. Dans plusieurs discours, triste écho du «chauvinisme grand-russe» de l’ère tsariste, l’autocrate Vladimir Poutine nie l’existence même des peuples de l’Ukraine, tandis que l’indépendance même du pays lui est insupportable.
Bien loin des prévisions initiales, démontrant de ce seul fait la fausseté de l’idéologie coloniale qui prévaut au Kremlin, l’armée ukrainienne et la population du pays résistent. Elle résiste par les armes, elle résiste aussi contre l’invasion par bien d’autres moyens. Tous les jours, des milliers de manifestant·e·s protestent dans les zones occupées par l’armée russe. Pour tenter de briser cette contestation, des maires et du personnel administratif sont enlevés. Depuis trois semaines, une centaine d’ingénieurs assurent notre sécurité collective à Tchernobyl. Cette guerre, comment l’oublier, convoque à nouveau le spectre du cataclysme nucléaire, civil et militaire.
Adressons-leur notre salut et notre solidarité.
Alors qu’a échoué le projet de briser en quelques jours l’Ukraine indépendante, la barbarie des armées russes augmente en intensité : bombardements et destructions de ville entières, usage d’armes interdites, recours à des supplétifs étrangers, déplacements forcés, villes assiégées, brutalités de toutes sortes… Il est à craindre que le déploiement de la terreur, les destructions et les massacres s’amplifient encore. Grozny et Alep hier ; Kiyv, Charkiv, Marioupol – Idlib aussi – aujourd’hui. Exigeons le retrait immédiat et inconditionnel des troupes russes de tout le territoire ukrainien !
La résistance, armée et non armée, du peuple ukrainien a son pendant en Russie et en Biélorussie. Dans ce dernier pays, des cheminots entravent avec courage l’utilisation par l’armée russe des chemins de fer. En Russie, dans des conditions difficiles, sous une répression qui s’accroît à mesure que les armées russes s’enlisent, des milliers de russes s’opposent à la guerre, sont emprisonnés pour cela. Les difficultés économiques et sociales, l’impossibilité de dissimuler longtemps encore les soldats russes tués au cours de cette chose qui a officiellement pour nom « opération militaire spéciale », ébranleront une société désorientée, amenant à des contestations croissantes. Elles peuvent aussi nourrir le nationalisme et la mentalité de ville assiégée, nourrie par les autorités. Une fin rapide de la guerre qui ne résulte pas dans l’asservissement de l’Ukraine dépend et de la résistance, armée et non armée, ukrainienne ; et de l’opposition à la guerre, sous toutes ses formes, en Russie et en Biélorussie.
Adressons-leur notre salut et notre solidarité.
Notre monde, déjà bien malmené, est entré dans une spirale d’incertitudes et d’inconnues. Pour s’orienter, il faut donc se doter d’une boussole. Certains, certaines, l’ont perdue ou ne l’ont pas trouvée. Il est aussi possible qu’elle indique une autre direction que le Nord. Il en va ainsi chez ceux et celles qui ne voient pas l’évidence, l’évidence d’une guerre d’agression visant à détruire l’indépendance de l’Ukraine. Des arguties, des subtilités qui se veulent intelligentes dissimulent guère leur embarras dès lors qu’il s’agit de condamner la Russie et son régime autocratique. Un régime qui a contribué à réprimer les mouvements démocratiques en Biélorussie et au Kazakhstan, qui bombarde les populations civiles de Syrie au secours d’une dictature parmi les plus brutales depuis septembre 2015, ou encore qui arme des commandos dans plusieurs pays d’Afrique ; un régime qui, à domicile, détruit toute liberté d’expression et toute liberté publique, tout droit social et démocratique. Un régime aussi qui finance et attise la haine et les extrêmes droites partout dans le monde. Obnubilé et fasciné par l’impérialisme américain, l’aiguille de leur boussole tourne sur elle-même. Emprisonné dans une vision géopolitique binaire, ils sont incapables de voir que la Russie est un régime réactionnaire, autocratique, antipopulaire et facteur considérable de déstabilisation dans le monde. Pire encore, ils ne voient pas les peuples, dont les aspirations disparaissent derrière cette terrible formule : « ah! il faut tenir compte des préoccupations légitimes de sécurité de la Russie ». Or, notre boussole a pour Nord la solidarité envers les peuples, non envers les États.
Est-ce à dire que nous nous trouvons dans une situation où le bien s’oppose au mal ? Aucunement. En raison même de cette boussole, comme le montre d’ailleurs la dernière décennie en Syrie comme en bien d’autres endroits du monde, nous n’accordons aucune confiance aux États occidentaux et à leurs alliances. Nous condamnons les appels aux réarmements qui se servent de la guerre d’agression de Poutine comme d’un prétexte. Les nationalismes, les attaques aux libertés publiques et démocratiques doivent fermement être rejeté. En résistant, et ils et elles le disent en reprenant une vieille formule des luttes pour l’indépendance de la Pologne, les peuples de l’Ukraine se battent pour leurs libertés et pour les nôtres. En nous solidarisant avec leur combat, nous nous battons pour leurs libertés et pour les nôtres. Ces principes amènent donc à réfléchir et à agir là où nous sommes :
Au-delà des tâches de solidarité élémentaire envers les ukrainien·nes et les opposant·e·s russes et biélorusses à la guerre, il s’agit d’affirmer clairement le principe d’un accueil sans restriction de toutes et tous les réfugié·e·s. Les sorties racistes, les hiérarchies xénophobes sont à condamner. Accueillir toutes et tous les réfugié·e·s signifie aussi défendre leurs droits, tous leurs droits, contre ceux qui semblent déjà se frotter les mains devant une main d’œuvre bon marché.
Se solidariser ici, c’est aussi reprendre cette revendication émise par les mouvements progressistes en Ukraine et en Europe de l’est : annulation immédiate de la dette extérieure ukrainienne !
Se solidariser ici, c’est comprendre que cette guerre montre tragiquement et cruellement qu’il est impossible de continuer avec une économie dont le carburant est le profit et les énergies fossiles. Plus de 700 millions d’euros sont payés, chaque jour, à la Russie. En 2003, nous disions, face à l’invasion américaine de l’Irak, « pas de guerre pour le pétrole », la situation n’est pas identique aujourd’hui, mais hier comme aujourd’hui, nous savons que les énergies fossiles tuent ! Alors que les températures sont anormalement chaudes aux pôles, il n’y a plus d’échappatoire. Il est de notre responsabilité de le comprendre et d’agir de telle sorte que les projets de se détacher des hydrocarbures russes ne se traduisent pas vers une nouvelle fuite en avant.
Se solidariser ici, c’est exiger, dans un pays qui abrite parmi les plus grandes firmes mondiales du secteur, un contrôle des prix et une répression de la spéculation sur les céréales. En 2020, le tiers des céréales commercialisées dans le monde étaient exportées d’Ukraine et de Russie. Des pays du Maghreb et du Machreq importent 40 à 80% de leur blé de ces deux pays. Avant même l’invasion russe de l’Ukraine, les prix connaissaient une importante hausse, alors même que des millions de personnes sont frappées par la famine ou la malnutrition, en particulier dans des pays comme l’Afghanistan, le Yémen ou le Nigéria ou encore tout l’est de l’Afrique. Dans les pays « du Nord », des mesures sociales sont, elles aussi, impérieuses. Il s’agira, ainsi que le reconnaît lui même le Financial Times, de taxer les contribuables les plus aisés pour assurer un filet aux classes laborieuses face aux conséquences sociales de cette guerre.
Condamner l’invasion Russe, défendre une Ukraine indépendante et libre, arracher nos sociétés à la trajectoire destructrice des énergies fossiles forment un même combat. Il nous reste à nous atteler à la tâche: participez à toutes les activités de solidarité et humanitaire que vous pouvez, rejoignez notre comité le 30 mars prochain à la Maison du Peuple, participez à la manifestation nationale du 2 avril.
Solidarité avec la résistance ukrainienne, solidarité avec les opposant·e·s russes et biélorusses à la guerre.
A bas le régime Poutine!
الشعب يريد إسقاط النظام (Ash-shaʻb yurīd isqāṭ an-niẓām)!
Ні війні! – Нет войне! – Non à la guerre!
Stop au pillage!
Guillaume Matthey
« Pollution, famines, corruption, évasion fiscale, blanchiment d’argent, destruction de la nature, extractivisme prédateur, pillage des ressources, déplacements forcés de populations : bienvenue au Financial Times Commodities Global Summit ! » Au Beau-Rivage. Voilà comment le collectif auquel j’appartiens accueillait les spéculateurs et les affameurs pour la 4e édition de ce sommet de la honte en 2016. Aujourd’hui, 6 ans après, je n’en changerais pas une ligne. Encore moins avec la guerre qui fait rage en Ukraine et qui rend encore plus visible le rôle que joue la Suisse pour l’oligarchie mafieuse russe. La Suisse n’a pas d’accès à la mer. Elle n’a pas de grande mine de charbon, de cuivre ou d’aluminium. Elle n’a pas de champs pétrolifères. Elle n’a pas les champs immenses du Brésil, d’Argentine ou des États-Unis. Pourtant, Elle est l’une des principales places financières du monde. Notamment pour les matières premières. À titre d’exemple, c’est depuis cette petite région continentale qui s’étend de Genève à Zoug qu’est acheté et vendu environ un tiers du pétrole mondial. Et c’est sur ce territoire que transite physiquement la majorité de l’or mondial pour être raffiné. Si pour vous, la raison pour laquelle nous sommes descendus à Ouchy contre le sommet qui se tient dans l’hôtel là-bas, n’est pas encore bien claire. Laissez-moi vous présenter quelques-unes et quelques-uns des illustres hôtes de l’Hôtel Beau-Rivage :
- Trafigura, l’entreprise de négoce basée à Lucerne qui a intoxiqué l’Afrique de l’Ouest en lui revendant un diesel trop sale pour être vendu en Europe.
- Vitol, l’entreprise de négoce basée à Genève, qui est devenu au milieu des années 2010 l’un des premier négociant du pétrole du régime dictatorial du Kazakhstan.
- Gunvor dont le siège à Genève avait été perquisitionné par la police fédérale pour soupçons de blanchiment d’argent et corruption avec le Congo où Gunvor avait conclu des marchés pour du pétrole.
- Vale, l’entreprise minière brésilienne installée à St-Prex dont les barrages ont cédé la dernière fois en 2019, causant la mort de plus de 200 personnes.
Mais venons-en à ce qui nous concerne aujourd’hui avec cette agression de l’armée Russe contre le peuple Ukrainien. Pour rappel :
- 80% des 200 milliards de francs que la Russie gagne avec son pétrole brut et son gaz sont négociés depuis la Suisse. 80% ! Dont ¾ à Genève ce qui veut dire que là, au bout du lac, il se vent pour 120 milliards de francs de pétrole et de gaz Russe.
- On peut aussi dire que 1/3 des fonds détenus par des entreprises et des personnes physiques russes à l’étranger se trouve en Suisse.
- On peut encore ajouter que 98% des gestionnaires russes interrogés disaient que leurs clients citaient la Suisse comme pays de prédilection pour mettre leur argent à l’abri.
Si donc, il faut condamner fermement l’impérialisme de l’État Russe, car c’est lui qui est agressif, qui est meurtrier aujourd’hui, n’oublions pas pour autant un autre impérialisme. Qui n’est pas militaire mais économique : celui de la Suisse. Car comme une pièce a ses deux faces, Le verso de la Suisse humanitaire et de la Suisse neutre, c’est celui qui est là. C’est la Suisse comme plaque tournante d’un commerce opaque, polluant, corrupteur et inégal. C’est la Suisse comme paradis fiscal et comme échappatoire aux sanctions internationales. La Suisse joue donc un rôle central dans la vente des matières premières et de la gestion des fortunes russes. Ce qu’il faut donc retenir, c’est que la Suisse a une responsabilité. Une énorme responsabilité. La solidarité internationale pour notre pays passe certes par l’envoi de matériel, de nourriture, d’argent. Mais elle doit aussi passer par la suspension du négoce de matières premières avec la Russie qui alimente les caisses de Poutine. Le Conseil Fédéral doit prendre ses responsabilités ! Morale de l’histoire : Les riches, les puissants, les dominants, les élites. Bref appelons-les les capitalistes. Ils savent tirer profit de la guerre pour s’enrichir et accroître leur pouvoir. En revanche, le champ de bataille, la boue, les bombes, les mutilations, c’est un privilège de pauvre.
Alors deux mots pour finir :
- Dehors les pollueurs, les spéculateurs, les affameurs ! Honte au Financial Times pour l’organisation de ce sommet ; honte à la Suisse et honte à Lausanne qui accueille ces pilleurs dans les beaux salons !
- Ouverture des frontières, accueil de tou-te-s les réfugiées et les migrantes et solidarité avec les peuples ukrainien en lutte! La Suisse peut mettre un frein d’urgence à cette catastrophe. Stop à cette guerre ignoble !