Poutine ne veut pas la paix, car la guerre lui est indispensable

24 novembre 2025 •

L’armée et le peuple ukrainiens protègent les peuples européens contre le régime poutinien depuis maintenant presque quatre ans, depuis ce funeste 24 février 2022 qui les a vu résister à la machine de guerre russe qui pensait prendre Kyiv et faire tomber la démocratie en quelques jours. Depuis ce moment, nous nous rendons compte chaque jour davantage que cette résistance ne concerne pas que l’Ukraine mais tout le continent. Sans elle, Poutine aurait poursuivi de pareilles « opérations militaires spéciales » contre les États baltes, la Moldavie, la Roumanie, la Pologne, etc.

Poutine et sa clique n’arrêteront leurs guerres que lorsqu’ils auront été contraints de quitter le pouvoir. Seule une défaite russe dans la guerre contre l’Ukraine le permettra. L’existence d’une société civile ukrainienne vivante, comme le démontre encore sa lutte présente contre la corruption, constitue en outre un contre-exemple fâcheux pour le régime tyrannique au pouvoir à Moscou. Depuis 2022, et même depuis 2014 et la révolution de Maïdan qui avait chassé du pouvoir Victor Ianoukovitch, l’autocrate inféodé au Kremlin et que ce dernier avait placé à la présidence, n’importe quel observateur attentif de la politique russe sait bien que les guerres successives lancées par Poutine n’ont pas d’autre objectif que son maintien au pouvoir. Comme dans tous les régimes tyranniques, la situation économique et sociale catastrophique de la Russie ne lui laisse qu’une manière de le faire : en fantasmant perpétuellement de nouveaux ennemis et en multipliant les agressions militaires. Si l’Ukraine tombe, non seulement aucun pays d’Europe ne sera à l’abri, mais le démantèlement accéléré du droit international de ces dernières années sera parachevé. 

L’« accord de cessez-le-feu » présenté par l’administration américaine ignore totalement cela, en prétendant que des concessions – et celles-ci semblent énormes, pour ce que nous en savons – amadoueront Poutine et le convaincront de se concentrer désormais sur le bien-être de sa population plutôt que de l’envoyer se faire exécuter dans les steppes ukrainiennes avec un matériel obsolète et défectueux. Ce que les États-Unis proposent n’est rien d’autre qu’une capitulation de l’Ukraine qui n’aura pour seule conséquence que d’encourager le tyran du Kremlin à de nouvelles invasions, car on lui aura montré que les démocraties sont faibles et lâches.

Il est faux de croire que la Russie est en train de gagner la guerre. Elle a déjà subi d’innombrables défaites, à chaque fois que les soldats et soldates ukrainiennes ont résisté alors que cela semblait impossible, contre un adversaire plus nombreux et alors que leurs alliés ne livraient les armements nécessaires qu’au compte-goutte. Après presque quatre ans de guerre, nous voyons bien que les demandes des premiers jours étaient en définitive les plus réalistes : un parapluie aérien, des livraisons d’armes massives et un blocus total contre la Russie. Si cela avait été fait en 2022, Poutine ne serait probablement plus au pouvoir et nous n’assisterions pas tétanisés aux sautes d’humeur d’un apprenti dictateur qui, depuis la Maison Blanche, veut imposer à l’Ukraine une défaite qu’elle n’a pas subi par les armes. Puisque le crédit diplomatique des États-Unis est désormais réduit à néant par la faute de son président, il reste à l’Europe – dont la Suisse fait partie, n’en déplaise aux poutinolâtres locaux – à bâtir une véritable solidarité avec l’Ukraine. En plus d’une intégration économique aussi poussée que possible, cela doit également signifier une coopération militaire renforcée, au sein de laquelle d’ailleurs les autres armées européennes auront sans doute davantage à apprendre de l’Ukraine qu’à lui enseigner. Le peuple ukrainien ne s’est pas battu en vain. En plus de gagner une reconnaissance des démocrates du monde entier, il a montré qu’il ne fallait pas s’agenouiller devant un tyran, ni faiblir dans son combat. Quoi qu’il se passe ces prochaines semaines, il restera l’un des grands exemples de résistance de ce premier quart de siècle et une inspiration décisive face à la montée mondiale des pouvoirs autoritaires.